Avec les actions (parfois spectaculaires) des salariés de Pétroplus, de Florange ou de Goodyear, celle d’Aulnay représente l’état actuel des luttes dans l’industrie, dans un contexte d’accélération de la casse de l’outil de travail par les groupes capitalistes et d’impuissance, mise en scène, des pouvoirs publics.
Le 17 mai, les grévistes ont voté la suspension du mouvement et la reprise du travail. Un accord a été signé avec la direction.
Les grévistes ont obtenu une prime supplémentaire de 20.000 euros, une « indemnité de de fin de litige », pour ceux d’entre eux qui quitteraient l’entreprise avant le 31 mai, en s’engageant à ne pas l’attaquer aux prud’hommes.
Ils ont obtenu des garanties de mutation interne pour 70 autres. Les poursuites et procédures de sanction, engagées par la direction contre certains grévistes – véritables intimidations – sont abandonnées.
De son côté, la direction peut refaire tourner l’usine, suivant ses objectifs de cadence, jusqu’à sa fermeture programmée en 2014. La CGT renonce à attaquer judiciairement le plan de « restructuration », ce qui aurait pu éventuellement la retarder.
Mais surtout la direction de PSA finit de faire acter, dans l’entreprise et dans le pays, son plan de suppression de 8.000 emplois et de fermeture de l’usine d’Aulnay.
Il faut saluer la ténacité des grévistes. Elle leur a permis d’arracher ces dernières avancées mais aussi toutes les précédentes.
Les syndicats d’accompagnement et de collaboration prétendent les avoir obtenues par la « négociation » du plan antisocial. Mais tous les salariés qui en bénéficieront, dont la majorité de non-grévistes, ne le devront qu’au rapport de forces construit par la grève. Que la grève ne puisse pas aller plus loin était très prévisible. Les limites dans lesquelles le mouvement s’est développé à Aulnay sont vite apparues.
Les soutiens et les manifestations de solidarité ont été nombreux – montrant des possibilités – mais sans que soit construite une large campagne convergente contre la casse de l’usine d’Aulnay, contre l’ensemble du plan de PSA, encore moins pour l’avenir de l’industrie automobile.
« Zéro PSA au Pôle emploi » : cette revendication syndicale, pleinement justifiée, a tenu lieu de perspective politique nationale.
Ainsi le pouvoir PS, dès juillet 2012, s’est placé dans la seule optique d’amendement du plan, côté « social », du reclassement du maximum de salariés de PSA, y compris en leur réservant des embauches dans les entreprises publiques. Nous avons écrit ailleurs sur les nouvelles aides accordées à PSA…
De son côté, le Front de gauche s’est concentré sur sa formule politique « d’interdiction des licenciements boursiers ». Le concept est très contestable sur le fond. Il est inopérant dans la lutte immédiate à PSA.
De même que le mot d’ordre général de Lutte ouvrière « d’interdiction de tous les licenciements ». La lutte à PSA aura servi à diffuser ce slogan universel. Jean-Pierre Mercier, responsable national de LO, devenu secrétaire de la CGT-PSA-Aulnay, ne manquera pas d’insister à la fête annuelle de ce mouvement, qui a juste lieu le lendemain de l’accord avec la direction de PSA.
En revanche, la perspective de nationalisation de PSA, de renationalisation intégrale de Renault, si longtemps défendue par le PCF, a été écartée par les principaux acteurs politiques.
Dans cette phase de saccage d’une industrie aussi structurante, de distribution scandaleuse d’aides publiques aux licencieurs et aux délocaliseurs etc., la nationalisation de l’automobile redevient pourtant une perspective rassembleuse, susceptible de faire converger les luttes, de renforcer l’efficacité de chacune.
Les limites de l’épisode PSA doivent nous y faire encore davantage réfléchir.