La Grèce, maillon le plus faible de la zone euro, s’est retrouvée depuis 2009, le laboratoire économique des plus dures mesures antisociales et anti-populaires du capitalisme pour solder sa propre crise aux dépens des travailleurs.
Mais elle est aussi devenue un laboratoire politique des idéologies de l’adaptation, de la résignation au système, de la re-légitimisation de l’UE.
La promotion depuis 2011, à partir de presque rien, du parti pro-européen Syriza, comme supercherie « radicale de gauche », a servi à détourner la contestation populaire de toute perspective d’émancipation de l’UE du capital et de son instrument l’euro.
Syriza a accédé au pouvoir après sa victoire aux élections anticipées du 25 janvier (avec 36%), en coalition avec le parti d’extrême-droite ANEL.
Depuis, leur gouvernement a apporté une caution générale aux possédants grecs (armement maritime, clergé, armée, grand patronat), également à l’OTAN et au FMI. Il a réduit le champ de l’alternative politique au cycle de négociations avec « l’ex-troïka », autour d’une dette factice, mais d’une dépendance financière totale, vu le choix de Syriza de défendre l’euro absolument et de resté privé de tout moyen de lever des fonds nationalement.
Tsipras et son gouvernement ont additionné les concessions au capital, dont la reprise des privatisations, les hausses de TVA, de cotisations sur les retraités etc. jusqu’à approcher d’un accord pour le quatrième plan d’austérité contre le peuple grec.
Devant l’impossibilité de le faire passer politiquement, sans déconsidérer sa posture de « résistant », sans se déconsidérer définitivement, Tsipras a choisi de faire porter la responsabilité de ses malheurs au peuple lui-même en convoquant – sur un texte de 19 pages – un référendum en 7 jours dans un climat orchestré de panique, sur fond de fuite accélérée des capitaux et de blocage de l’activité bancaire.
Le socio-démocrate Papandréou avait déjà essayé en 2011 la même manoeuvre, avant d’en être dissuadé devant le risque de regroupement anti-euro.
En 2015, entre le oui et le non, l’alternative se place entre :
- l’acceptation du quatrième mémorandum « négocié » avec l’UE et son nouveau volant de mesures antisociales,
- et celle de sa renégociation, dans la version acceptée par les leaders de Syriza (malgré leurs postures actuelles de « résistances »).
Le référendum : C’est un jeu de dupes où le peuple est appelé à signer ses sacrifices et sa soumission, dans tous les cas de figure.
Tsipras et son ministre des finances Varoufakis ont promis avant les élections de janvier de rembourser le FMI et ont vidé les caisses des collectivités et des hôpitaux pour commencer à le faire.
- La dette envers l’UE, reprise et gonflée par les institutions européennes pour épargner les intérêts privés – des banques - en 2011, ne correspond qu’à des jeux d’écritures. Strauss-Kahn ou le vice-chancelier socio-démocrate allemand Sigmar Gabriel, font maintenant des propositions allant dans le sens de Tsipras. L’UE a bien un plan B.
- La victoire du « oui » dans ce climat de panique serait une soumission immédiate.
- La victoire du « non », sur un sentiment spontané de fierté et de résistance nationales, n’ouvrirait qu’à une deuxième version – la version Tsipras – de la même chose, une austérité « allégée ».
Cette dernière option aurait de surcroît l’avantage de donner l’illusion aux peuples que l’UE tient compte de leur voix. La social-démocratie, une certaine « gauche radicale » européenne, la présenteront comme, dans chaque pays, comme une " avancée démocratique européenne » alors qu’elle correspond en réalité à une nouvelle soumission à l’UE du capital. La réhabilitation aux yeux des masses européenne d’une certaine légitimité à l’Union européenne, cette machine à broyer les acquis sociaux et démocratiques nationaux, du moins l’atténuation de son discrédit est une préoccupation centrale du système.
Depuis 2011, le pouvoir en Grèce et l’UE, avec la propagande pro-européenne de Syriza ont détruit les possibilités politiques immédiates de contestation majoritaire anti-UE, d’une sortie de l’UE. Elles y ont travaillé minutieusement depuis 2011, sans hésiter à orienter une certaine contestation « radicale » vers l’extrême-droite, dans sa composante, alliée à Syriza, ANEL (avec des ministères comme la défense et le tourisme), xénophobe et ultra-libérale, ou dans sa composante néonazie, « l’Aube Dorée » dont les députés ont été les seuls de l’opposition à voter pour la tenue du référendum.
Le Grèce de Tsipras est prête à devenir le symbole politique de la résignation à l’UE, dans sa relégitimisation social-démocrate, aussi à jouer, dans une atmosphère possible d’instabilité politique, jusqu’à même prendre le risque de nourrir le fascisme.
Le Parti communiste grec KKE, et son émanation syndicale le PAME, sont les seules forces conséquentes, de masse et de classe, à s’opposer à ces perspectives, à dénoncer les supercheries de Syriza et du référendum. Elles appellent courageusement à l’abstention malgré la manipulation officielle. Elles organisent, sans relâche, les luttes des travailleurs contre leurs patrons, les possédants et ce régime.
Le soutien aux travailleurs grecs passe par les luttes dans notre pays sur des positions de rupture et contre les politiques de casse des acquis et des droits des salariés.
Nous devons les soutenir et partager avec elles la conviction que c’est dans l’opposition dans chaque pays, aux tenants du capital, maintenant aux tenants de l’UE, que nous exprimerons au mieux notre solidarité internationaliste.
Pour les communistes français
Cette expérience difficile, dramatique, alimente les débats concernant notre propre parti, en particulier les critiques sur la poursuite de son adhésion au PGE.